Récepteur : Auguste KOUSSINGUISSA
Langue : beembe
Année de réception : inconnue
Interprète : inconnu
1) Mbau mu Sodomo na ngundu-ngundu [1]
Le feu s'est abattu sur Sodome comme l'éclair (comme la pluie ?)
Bu bakonini kuyuila ma leele Loti
Parce qu'ils n'ont pas écouté ce que disait Loth
Bu bakotiri mu mia nsoni, Nzambi wa baka mankesi,
et ont fait des choses honteuses, Dieu s'est mis en colère
Mbau ya sunduka, ya leeme mu Sodomo
Le feu est descendu du ciel, il a embrasé Sodome
Ba nienge mu mbau
Ils ont été consumés par le feu !
Mvutu / Refrain :
Mbau na ngundu-ngundu, na ngundu-ngundu
Le feu tonne, tonne
Mbau na ngundu-ngundu mu Sodomo
Le feu tonne dans Sodome
Mbau na ngundu-ngundu, na ngundu-ngundu
Le feu tonne, tonne
Mbau na ngundu-ngundu, baatu ba nienge !
Le feu tonne, et les gens sont consumés !
2) Nzambi wa heke ba mbasi kuri tata Loti
Dieu envoya des anges à papa Loth :
« Tata Loti na mukasi na baala baku, yisikee mu Sodomo !
« Papa Loth, quitte Sodome avec ta femme et tes enfants !
Nzambi wa baka mankesi sa ka bunga Sodomo na Ngomolo,
Dieu est en colère, il va détruire Sodome et Gomorrhe,
Bu bakonini ku yuila mia Yave,
Parce qu'ils n'ont pas écouté Yahvé,
Sa ba nienge mu mbau ! »
Ils seront consumés par le feu ! »
3) Mu kiminu tata Loti na baala boolo ba bakietu ba pala mu Sodomo
Par la foi, papa Loth et ses deux filles sortirent de Sodome.
Mukasi tata Loti bu ka konini kiminu,
Comme la femme de papa Loth manquait de foi,
Wa teleme, wa sieteke wa tata ku mambisa, wa kituka kimama.
Elle s'est arrêtée, s'est retournée, a regardé en arrière et a été changée en statue.
Biobinso mu Sodomo biafukila, biafukila, bia nienge mu mbau !
Toutes choses dans Sodome ont été détruites, détruites, consumées par le feu !
4) Beenu se, mu kiseendu kia moono ki,
Vous également, gens de cette nouvelle génération,
Seene kiminu mpisi lu vuuka, bwa vuuka Loti
Ayez la foi, afin d'être sauvés, comme le fut Loth
Kasi balaka sa bakituka mukasi Loti
Cependant, plusieurs connaîtront le sort de la femme de Loth,
Mbuti lu kuulukiri ko mu bimvwama bia ha nsi
Si vous ne vous libérez pas des richesses de ce monde
Ngundu-ngundu bu yi bwiri mu kilumbu kia mutsundu,
Quand le feu qui tonne s'abattra au jour du jugement,
Sa lwa nienge mu mbau !
Vous serez consumés par le feu !
Commentaire :
Le chant adresse une mise en garde terrifiante à tous ceux qui ne se conduisent pas conformément à la volonté de Dieu. Il met évidence les deux seules possibilités qui s'offrent à l'être humain : vivre par la foi et être sauvé, ou bien désobéir à Dieu et périr par le feu de son jugement.
La ligne interprétative du récit biblique de Genèse 19, 1-29 se situe dans ce qu'on appelle la théologie de la rétribution : Dieu sauve les justes et punit les pécheurs. Cependant, même en Afrique où cette théologie est très vastement admise, ce chant passe mal, en raison de sa manière directe et choquante d'invectiver les pécheurs. On l'écoute volontiers comme chant d'animation, parce que sa mélodie est très rythmée, mais on ne s'attarde pas sur le caractère effrayant de son contenu...
Notons que l'épouse de Loth est d'emblée présentée comme une femme sans foi ; or le texte biblique ne dit rien de tel. Il raconte simplement comment, en regardant en arrière, elle désobéit à l'ordre de l'ange chargé de détruire Sodome (« Sauve-toi pour ta vie ; ne regarde pas derrière toi... de peur que tu ne périsses. » Genèse 19, 17). Dans notre chant, la désobéissance de la femme de Loth est interprétée comme un manque de foi qu'elle paye de sa vie.
Le style narratif de la troisième strophe nous laisse imaginer la course folle de Loth et sa famille à travers la plaine du Jourdain, pour échapper à la catastrophe. Puis vient le moment où, pour la femme de Loth, cette fuite vers l'inconnu devient problématique : à Sodome, elle a construit sa vie, elle s'y est richement établie et ses deux filles s'y sont mariées avec des habitants du pays (Genèse 19, 14). Comment partir en laissant derrière elle tout ce qui leur appartient ? Pour la femme de Loth, la course pour sauver sa vie n'est plus possible. Elle s'arrête, dit le chant, elle se retourne un instant vers la vie qu'elle vient de quitter, et c'est la fin : elle est figée à tout jamais, pour avoir désobéi à la consigne salutaire de l'ange.
Mais prêtons attention à cette terrifiante pluie de feu qui tonne comme l'éclair. Pour un récepteur n’ayant pas eu accès à la Bible dans sa langue maternelle (le beembe), l'expression mbau na ngundu-ngundu, au regard du récit de la Genèse, est pleine de justesse, car elle rend bien l'idée du narrateur biblique qui raconte comment Dieu fit pleuvoir du soufre et du feu sur Sodome et Gomorrhe (Genèse 19, 24).
Par ailleurs, en langue beembe (une des langues de l'aire kongo), ngundu désigne une action de défrichage souvent réalisée au moyen du feu et destinée à rendre un terrain cultivable. On déracine les mauvaises herbes (ku soolo mangundu, enlever les mottes), on les brûle et la cendre obtenue sert à fertiliser le sol (c’est la pratique de l’écobuage de laquelle les Pyrénées tirent leur nom, d’après l’historien grec Diodore de Sicile [2]). Le terrifiant ngundu-ngundu annonçant le jugement dernier peut alors être entendu d’une toute autre manière, car il évoque une action divine ayant pour objectif de consumer le mal à la racine pour rendre à l’humain sa fertilité, sa capacité à produire de bons fruits, de bonnes actions qui plaisent au Créateur.
Toutefois, cette hypothèse de lecture n’enlève rien à la gravité de la sanction qui s’abat sur les habitants de Sodome : seul Loth et sa famille sont épargnés. Loth, porte-parole méprisé de Dieu au milieu d’une société envahie par le mal, abandonne toutes ses richesses et quitte Sodome sans se retourner, devenant ainsi un modèle de foi et d’obéissance à Dieu. Quant à son épouse, elle prend la figure de l’homme esclave de ses biens et enclin à la désobéissance, à cause de l’attrait du monde auquel il n’arrive pas à résister.
L’avertissement solennel donné par le chant s’adresse à toutes les générations, à toute personne, pour que chacun, au lieu de provoquer la colère divine par des actions honteuses, veille à faire ce qui est bon, dans l’intérêt de tous.
[1] Ngundu-ngundu : onomatopée, probablement issue du verbe ngunduka (tonner, faire un éclair, comme un coup de fusil) ou du mot ma-ngundu-ngundu (bruine, gouttes dans la forêt après la pluie).
[2]« Autrefois elles étaient en grande partie couvertes de bois épais et touffus ; mais elles furent, dit-on, incendiées par quelques pâtres qui y avaient mis le feu. L'incendie ayant duré continuellement pendant un grand nombre de jours, la superficie de la terre fut brûlée, et c'est de là que l'on a donné à ces montagnes le nom de Pyrénées. La combustion du sol fit fondre des masses de minerai d'argent et produisit de nombreux ruisseaux d'argent pur. » Diodore de Sicile, Bibliothèque historique, livre V, ch. XXXV, page 36, trad. Ferdinand Hoefer (1851).
Langue : beembe
Année de réception : inconnue
Interprète : inconnu
1) Mbau mu Sodomo na ngundu-ngundu [1]
Le feu s'est abattu sur Sodome comme l'éclair (comme la pluie ?)
Bu bakonini kuyuila ma leele Loti
Parce qu'ils n'ont pas écouté ce que disait Loth
Bu bakotiri mu mia nsoni, Nzambi wa baka mankesi,
et ont fait des choses honteuses, Dieu s'est mis en colère
Mbau ya sunduka, ya leeme mu Sodomo
Le feu est descendu du ciel, il a embrasé Sodome
Ba nienge mu mbau
Ils ont été consumés par le feu !
Mvutu / Refrain :
Mbau na ngundu-ngundu, na ngundu-ngundu
Le feu tonne, tonne
Mbau na ngundu-ngundu mu Sodomo
Le feu tonne dans Sodome
Mbau na ngundu-ngundu, na ngundu-ngundu
Le feu tonne, tonne
Mbau na ngundu-ngundu, baatu ba nienge !
Le feu tonne, et les gens sont consumés !
2) Nzambi wa heke ba mbasi kuri tata Loti
Dieu envoya des anges à papa Loth :
« Tata Loti na mukasi na baala baku, yisikee mu Sodomo !
« Papa Loth, quitte Sodome avec ta femme et tes enfants !
Nzambi wa baka mankesi sa ka bunga Sodomo na Ngomolo,
Dieu est en colère, il va détruire Sodome et Gomorrhe,
Bu bakonini ku yuila mia Yave,
Parce qu'ils n'ont pas écouté Yahvé,
Sa ba nienge mu mbau ! »
Ils seront consumés par le feu ! »
3) Mu kiminu tata Loti na baala boolo ba bakietu ba pala mu Sodomo
Par la foi, papa Loth et ses deux filles sortirent de Sodome.
Mukasi tata Loti bu ka konini kiminu,
Comme la femme de papa Loth manquait de foi,
Wa teleme, wa sieteke wa tata ku mambisa, wa kituka kimama.
Elle s'est arrêtée, s'est retournée, a regardé en arrière et a été changée en statue.
Biobinso mu Sodomo biafukila, biafukila, bia nienge mu mbau !
Toutes choses dans Sodome ont été détruites, détruites, consumées par le feu !
4) Beenu se, mu kiseendu kia moono ki,
Vous également, gens de cette nouvelle génération,
Seene kiminu mpisi lu vuuka, bwa vuuka Loti
Ayez la foi, afin d'être sauvés, comme le fut Loth
Kasi balaka sa bakituka mukasi Loti
Cependant, plusieurs connaîtront le sort de la femme de Loth,
Mbuti lu kuulukiri ko mu bimvwama bia ha nsi
Si vous ne vous libérez pas des richesses de ce monde
Ngundu-ngundu bu yi bwiri mu kilumbu kia mutsundu,
Quand le feu qui tonne s'abattra au jour du jugement,
Sa lwa nienge mu mbau !
Vous serez consumés par le feu !
Commentaire :
Le chant adresse une mise en garde terrifiante à tous ceux qui ne se conduisent pas conformément à la volonté de Dieu. Il met évidence les deux seules possibilités qui s'offrent à l'être humain : vivre par la foi et être sauvé, ou bien désobéir à Dieu et périr par le feu de son jugement.
La ligne interprétative du récit biblique de Genèse 19, 1-29 se situe dans ce qu'on appelle la théologie de la rétribution : Dieu sauve les justes et punit les pécheurs. Cependant, même en Afrique où cette théologie est très vastement admise, ce chant passe mal, en raison de sa manière directe et choquante d'invectiver les pécheurs. On l'écoute volontiers comme chant d'animation, parce que sa mélodie est très rythmée, mais on ne s'attarde pas sur le caractère effrayant de son contenu...
Notons que l'épouse de Loth est d'emblée présentée comme une femme sans foi ; or le texte biblique ne dit rien de tel. Il raconte simplement comment, en regardant en arrière, elle désobéit à l'ordre de l'ange chargé de détruire Sodome (« Sauve-toi pour ta vie ; ne regarde pas derrière toi... de peur que tu ne périsses. » Genèse 19, 17). Dans notre chant, la désobéissance de la femme de Loth est interprétée comme un manque de foi qu'elle paye de sa vie.
Le style narratif de la troisième strophe nous laisse imaginer la course folle de Loth et sa famille à travers la plaine du Jourdain, pour échapper à la catastrophe. Puis vient le moment où, pour la femme de Loth, cette fuite vers l'inconnu devient problématique : à Sodome, elle a construit sa vie, elle s'y est richement établie et ses deux filles s'y sont mariées avec des habitants du pays (Genèse 19, 14). Comment partir en laissant derrière elle tout ce qui leur appartient ? Pour la femme de Loth, la course pour sauver sa vie n'est plus possible. Elle s'arrête, dit le chant, elle se retourne un instant vers la vie qu'elle vient de quitter, et c'est la fin : elle est figée à tout jamais, pour avoir désobéi à la consigne salutaire de l'ange.
Mais prêtons attention à cette terrifiante pluie de feu qui tonne comme l'éclair. Pour un récepteur n’ayant pas eu accès à la Bible dans sa langue maternelle (le beembe), l'expression mbau na ngundu-ngundu, au regard du récit de la Genèse, est pleine de justesse, car elle rend bien l'idée du narrateur biblique qui raconte comment Dieu fit pleuvoir du soufre et du feu sur Sodome et Gomorrhe (Genèse 19, 24).
Par ailleurs, en langue beembe (une des langues de l'aire kongo), ngundu désigne une action de défrichage souvent réalisée au moyen du feu et destinée à rendre un terrain cultivable. On déracine les mauvaises herbes (ku soolo mangundu, enlever les mottes), on les brûle et la cendre obtenue sert à fertiliser le sol (c’est la pratique de l’écobuage de laquelle les Pyrénées tirent leur nom, d’après l’historien grec Diodore de Sicile [2]). Le terrifiant ngundu-ngundu annonçant le jugement dernier peut alors être entendu d’une toute autre manière, car il évoque une action divine ayant pour objectif de consumer le mal à la racine pour rendre à l’humain sa fertilité, sa capacité à produire de bons fruits, de bonnes actions qui plaisent au Créateur.
Toutefois, cette hypothèse de lecture n’enlève rien à la gravité de la sanction qui s’abat sur les habitants de Sodome : seul Loth et sa famille sont épargnés. Loth, porte-parole méprisé de Dieu au milieu d’une société envahie par le mal, abandonne toutes ses richesses et quitte Sodome sans se retourner, devenant ainsi un modèle de foi et d’obéissance à Dieu. Quant à son épouse, elle prend la figure de l’homme esclave de ses biens et enclin à la désobéissance, à cause de l’attrait du monde auquel il n’arrive pas à résister.
L’avertissement solennel donné par le chant s’adresse à toutes les générations, à toute personne, pour que chacun, au lieu de provoquer la colère divine par des actions honteuses, veille à faire ce qui est bon, dans l’intérêt de tous.
[1] Ngundu-ngundu : onomatopée, probablement issue du verbe ngunduka (tonner, faire un éclair, comme un coup de fusil) ou du mot ma-ngundu-ngundu (bruine, gouttes dans la forêt après la pluie).
[2]« Autrefois elles étaient en grande partie couvertes de bois épais et touffus ; mais elles furent, dit-on, incendiées par quelques pâtres qui y avaient mis le feu. L'incendie ayant duré continuellement pendant un grand nombre de jours, la superficie de la terre fut brûlée, et c'est de là que l'on a donné à ces montagnes le nom de Pyrénées. La combustion du sol fit fondre des masses de minerai d'argent et produisit de nombreux ruisseaux d'argent pur. » Diodore de Sicile, Bibliothèque historique, livre V, ch. XXXV, page 36, trad. Ferdinand Hoefer (1851).